29 janvier 2006

 

CPE : Cadeau Pour Employeur

CPE : Eléments de réflexion :

1. Le gouvernement dramatise la situation des jeunes pour mieux justifier son intervention.

Il dit : « il y a 22 % de taux de chômage chez les jeunes ».
Une classe d’age c’est 750 000 jeunes.
De 15 à 24 ans, cela représenterait 7,5 millions x 22 % : 1,7 million au chômage.

En vérité : il ne tient pas compte des jeunes en scolarité (qui ne sont pas sur le marché du travail), apprentissage (qui ont donc un contrat de travail).

La proportion réelle de jeunes au chômage est de 8,1 %, soit le taux moyen dans l’Union européenne.
Il ne s’agit pas de dire que c’est satisfaisant, bien entendu, mais pourquoi grossir le trait si ce n’est pour justifier les mesures prises ?

2. Le gouvernement passe sous silence l’importance de la formation initiale (et continue) dans l’accès à l’emploi.

C’est la formation qui est la base de l’emploi de qualité.
5 à 10 ans après la fin des études :
28 % des jeunes sans diplôme sont sans emploi,
12 % des jeunes, s’ils ont un CAP / BEP,
7,6 % des jeunes, s’ils ont le BAC ou équivalent,
5,2 % des jeunes, s’ils ont une formation supérieure.

En fait, ce n’est pas une nouvelle forme de contrat qui changera la donne. Elle ne fera qu’aggraver la situation de précarité.

3. Le gouvernement accentue la précarité de vie des jeunes par le biais du CPE.

En effet, on sait déjà que sur les 762 000 jeunes sortis du système éducatif en 2001, 78 % avaient un emploi 3 ans après leur arrivée sur le marché du travail alors que la proportion était de 82 % pour la génération 1998.

Est-ce que c’est sans rapport avec la mise en œuvre des emplois jeunes, etc. et surtout de la multiplication des « stages » en tout genre dans les entreprises pendant cette période ?

Entre 2002 et 2004, la proportion des élèves du 2nd degré en stage est passée de 2,9 à 5,3 %.

Seule une petite partie des stages ouvre droit à une indemnité assortie de droits sociaux (chômage, assurance vieillesse…).

Aujourd’hui, le gouvernement feint de découvrir le problème. Pourquoi ne pas contraindre les entreprises à proposer des emplois aux jeunes plutôt que des stages à répétition ?

4. Les contrats précaires entraînent une vie précaire.

Logement : même avec la mise en œuvre de locapass (garantie publique sur la caution du loyer), trouver un logement avec un CDD, contrat de mission ou un CPE relève de la gageure : un bailleur préfère des locataires ou des accédants qui jouissent d’une certaine visibilité sur le plan professionnel, surtout avec des baux de 3 ans !

Crédits financiers : la situation est identique.

Si le CPE n’est pas une forme de contrat précaire, comme l’affirme le Premier ministre, pourquoi insister sur le fait qu’il est intervenu auprès des banques pour obtenir des garanties que les CDD, CPE, CNE seraient considérés comme le CDI ?

Et que valent les déclarations de principe des banques de considérer sur un même pied les CDI véritables et les CPE (ou CNE) ?

Un conseiller financier sera jugé sur les garanties qu’il aura prises auprès des emprunteurs.

Avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête, pendant deux ans, comment un jeune pourra-t-il décrocher son prêt sur 10 ou 15 ans ?

5. Le gouvernement veut s’en prendre au CDI et instaurer un contrat unique d’embauche.

Résumons :
- le CNE s’applique dans les entreprises de moins de 20 personnes,
- le CPE s’appliquerait aux jeunes de moins de 26 ans,
- le CDD seniors s’appliquerait aux salariés les plus âgés.

On commence par « rogner » sur le CDI, puis on s’apprête à lui donner le coup de grâce : le « contrat unique d’embauche ».

Le Premier ministre a déjà déclaré : « ce que je ne peux pas écarter, c’est la question d’une cohérence globale du contrat de travail et donc, je me pose la question : faut-il un ou plusieurs contrats de travail ? ».

On aurait ainsi un « CDI nouvelle formule » qui serait en fait un CNE généralisé. Jeune ou moins jeune, petite ou grande entreprise, c’est la précarité qui serait ainsi généralisée !!

6. Le gouvernement s’attaque ainsi aux conventions collectives

Le Code du travail réglemente peu la période d’essai, ce qui renvoie donc aux conventions collectives pour fixer les durées exactes de périodes d’essais (souvent 3 mois renouvelables).

Dès lors, le CPE devient opposable aux conventions collectives. Il ne sera plus possible de demander la titularisation d’un salarié sur la base de la convention collective.

Alors que les accords collectifs faisaient avancer la loi, c’est maintenant la loi qui fait reculer le droit social.

7. Le gouvernement rend impossible l’exercice du syndicalisme pour les jeunes.

Sachant qu’il peut être licencié sans explication, quel nouveau salarié prendra le risque de se syndiquer, voire de prendre des responsabilités dans un tel contexte ?

8. Le CPE, c’est le salarié jetable !

L’objectif du patronat et du gouvernement, c’est la flexibilité totale. L’embauche-minute et le licenciement-minute !

Alors que les difficultés financières de l’assurance chômage (Unedic) sont essentiellement liées à l’explosion des contrats précaires (CDD, contrats d’intérim), le gouvernement dit : on fait plus et plus fort !

Verra-t-on demain des salariés embauchés pour une semaine, une journée, une heure au nom du principe « c’est mieux que rien du tout » ?

Comment pourra-t-on garantir aux salariés, à leurs familles, leurs enfants, des revenus décents ?

Du «CNE=Contrat Nouvelle Embrouille» au «CPE=Cadeau Pour l’Employeur», c’est la précarité pour tous qui est en train de s’étendre.

Si rigidités il y a, elles ne sont pas sociales mais économiques.

La plus grande des rigidités, c’est la répartition de plus en plus inégale des richesses produites.





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