17 mars 2006

 

CPE : Ceci expliquerait donc cela …

Question : Mais de quelle planète provient le CPE ?

Réponse : En fait, le CPE est un pur produit de la technocratie, puisque nous savons maintenant que Villepin en a confié l'élaboration à un énarque spécialiste des statistiques.

Mais reprenons dès le début.
Alors, oui, comment est venue à Dominique de Villepin la lumineuse idée du CPE ?

Comment un gouvernement a-t-il pu concevoir un objet juridique aussi mal ficelé, rejeté par une grande majorité des jeunes et la totalité des syndicats de salariés, puis le faire voter à la hussarde par une majorité tétanisée ?

La réponse est à chercher dans les bureaux de Matignon, où le contrat première embauche a été directement concocté en petit comité par le staff du Premier ministre.

Le père du CPE s'appelle Louis-Charles Viossat. Il est directeur adjoint du cabinet de Dominique de Villepin.

Agé de 42 ans, ce membre de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) est sorti en 1992 de l'Ena, dans la même promotion que Valérie Pécresse, députée des Yvelines et porte-parole de l'UMP, et Gilles Grapinet, directeur de cabinet de Thierry Breton à Bercy.

«C'est un excellent connaisseur des questions de Sécurité sociale, et c'est surtout un pur techno», souligne un syndicaliste administrateur de l'Acoss (la banque de la Sécu).

Etudiant, Louis-Charles Viossat militait au Parti socialiste.

Il était même un des animateurs des jeunes rocardiens, rappelle un de ses anciens condisciples.

Puis, il est entré en 1996, au cabinet du centriste Jacques Barrot, alors ministre du Travail.

Après la victoire de la gauche aux législatives de 1997, le futur père du CPE a alors quitté la sphère politique.

En 2000, il a participé à la rédaction d'un rapport de l'Igas sur les fonds d'aide aux jeunes et leur utilisation dans les politiques d'insertion.

Et en 2002, quand la droite revient aux affaires, le ministre de la Santé, Jean-François Mattei, en fait son directeur de cabinet.

Mais lors de la canicule de l'été 2003, Viossat brille par son absence : Louis-Charles est en congé. C'est donc la directrice adjointe qui portera le chapeau des dysfonctionnements au ministère de la Santé pendant la crise.

En avril 2004, après la déroute des régionales, Jean-François Mattei quittant le gouvernement, son directeur de cabinet est reclassé comme directeur général de l'Acoss. Il y méditera à loisir sur l'impact des politiques d'emploi : la banque de la Sécu, qui centralise les déclarations Urssaf, est une des meilleures sources statistiques sur le marché du travail.

C'est là qu'en juin 2005 Villepin vient le chercher pour lui confier à Matignon la lourde tâche de concocter un plan d'urgence pour l'emploi. Ce sera le contrat nouvelles embauches (CNE), instauré par ordonnance l'été dernier, et qui sera réservé aux entreprises de moins de 20 salariés.

Fin octobre 2005, éclatera la crise racaille/banlieues. Conséquences à Matignon : les conseillers sont priés de réfléchir à une réponse adaptée sur l'emploi des jeunes.

Rue de Grenelle, on décline l'offre : Jean-Louis Borloo estime que les mesures de son plan de cohésion sociale sont suffisantes et le ministre de l'Emploi, Gérard Larcher, met en garde sur l'absence de négociations avec les syndicats.

Villepin passe outre. Sans avoir consulté les partenaires sociaux, il annonce par surprise le 16 janvier la création d'un contrat réservé aux jeunes de moins de 26 ans. Un dispositif adapté selon lui à la situation spécifique des jeunes «laissés-pour-compte de notre société».

Pourtant, preuve que le gouvernement n'a pas vraiment la banlieue pour souci premier, les ministres, lors des débats au Parlement, se succèdent pour recourir à des exemples issus de leur propre famille.

Tel Gilles de Robien (Education nationale), qui, comme beaucoup d'autres membres du gouvernement, explique que son fils avec un bac + 5 «est resté neuf mois sans travail [...]» :
«Je suis certain qu'avec le CPE ce délai aurait été réduit.»

Au vu de l'hostilité à son dispositif qui croît dans l'opinion, l'argumentaire du Premier ministre évolue à partir de début mars.

Et voilà que le CPE redevient une réponse aux émeutes urbaines de l'automne.

Ainsi, dimanche 12 mars, sur TF1, Villepin se souvient tout à coup que son contrat a été pensé en priorité pour satisfaire les jeunes des banlieues.

«Cela s'adresse à ceux qui ont le plus de difficulté pour entrer sur le marché de l'emploi»,
souligne-t-il, en affichant comme preuve de sa bonne foi le fait que cet amendement gouvernemental dégainé tardivement a été intégré dans le projet de loi sur l'égalité des chances de Borloo, lui-même élaboré après la crise des banlieues.

On sait qu’aujourd’hui, les lycéens et les étudiants ne l'ont pas entendu ainsi…

Tiré de l’excellent article de F. WENZ-DUMAS, pour le quotidien Libération du Ve. 17 mars 2006.

 

Même l'Europe !

Le CPE et la CJCE.

Difficile de l’ignorer maintenant, le contrat première embauche (CPE), petit frère du CNE, a été réservé par Villepin et les parlementaires de la majorité actuelle, aux moins de 26 ans.

Ce qui est moins connu, c’est qu’aux dernières nouvelles, il pourrait être retoqué par la justice européenne pour non-conformité aux règles anti-discrimination.

La Cour de justice de Luxembourg a en effet estimé récemment que la suppression de garanties légales pour une population caractérisée par son âge était «discriminatoire», sauf si la mesure est «dûment justifiée et proportionnée».

Alors, l’est-elle dans le cas du CPE ?

Le peuple des étudiants et des travailleurs, lui, vient de massivement affirmer que NON !

Voici donc, qu’autre front est ouvert pour Villepin et ses affidés, celui d’une bataille juridique qui ne fait que commencer.

Mais Nous, les Travailleurs, n’attendrons pas que les juges décident à notre place.

Notre place, elle est aux côtés des jeunes et des salariés, pour défendre et améliorer le Code du Travail, nos garanties et nos droits.

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