07 mars 2006

 

Comment on en vient à la grève et à manifester.

Le CPE (Contrat Première Embauche),
est le principal motif de la mobilisation
Force Ouvrière

En quelques dates, voici le rappel chronologique de cet attentat au code du travail qui a entraîné des manifestations dans toute la France et le blocage de plusieurs universités.

- 16 janvier : Le Premier ministre Dominique de Villepin annonce la création du CPE, un contrat de travail spécialement réservé aux moins de 26 ans.
Inspiré du contrat nouvelles embauches (CNE), il débute par une période de deux ans au cours de laquelle l'employeur peut licencier son salarié sans justification.
- Les syndicats, sauf la CFE-CGC, dénoncent une "institutionnalisation de la précarité".

- 17 janvier : Une partie de la majorité parlementaire voit dans le CPE un "contrat de précarité absolue pour les jeunes".
- Tandis que le Medef estime qu'il "faut aller beaucoup, beaucoup plus loin" dans la libéralisation du droit du travail.
- L’opposition parlementaire accuse le Premier ministre d'avoir "tué" le CDI.

- 19 janvier : Une douzaine d'organisations de jeunes et de syndicats étudiants (dont le premier d'entre eux, l'Unef) s’unissent pour obtenir le retrait du CPE et appellent les confédérations syndicales à les soutenir.
- Le syndicat lycéen Fidl se dit "scandalisé" par le CPE, œuvre d'un "gouvernement anti-jeunes".

- 24 janvier : Le gouvernement annonce l'examen en toute urgence, dès le 31 janvier, du projet de loi sur l'égalité des chances incluant le CPE.
- Les confédérations syndicales (sauf la CFE-CGC), l'Unef, l'UNL et la Confédération étudiante appellent à manifester le 7 février.

- 25 janvier : La FCPE (parents d'élèves) appelle à la mobilisation du 7 février.

- 31 janvier : Début du débat parlementaire, lequel verra, in fine, l’utilisation de l’arme fatale à la démocratie : le 49-3.

- 7 février: 400.000 personnes manifestent dans toute la France pour le retrait du CPE.

- 9 février : Adoption du CPE par l'Assemblée nationale après une bataille de procédure.

- 10 février : Les confédérations syndicales et les mouvements lycéens et étudiants appellent à une journée nationale de mobilisation, le 7 mars pour exiger, à nouveau, le retrait du CPE.

- 14 février : Journée de mobilisation des étudiants et lycéens avec plusieurs milliers de manifestants à Paris, Toulouse, Rennes et Lyon.

- 16 février : D’autres milliers de manifestants, dans plusieurs grandes villes.

- 20 février : Le comité confédéral national de Force Ouvrière appelle à une grève interprofessionnelle le 7 mars et à manifester pour le retrait du CPE.
La Fédération Nationale de l’Action Sociale Force Ouvrière se joint aussitôt à cette mobilisation, et appelle à son tour, tous les salariés, retraités et chômeurs de l’action sociale et médicosociale sans but lucratif, à une grève générale dans ses branches professionnelles

- 21 février : Rejet d'une motion de censure socialiste contre la politique sociale du gouvernement.

- 27 février : Début du débat sur le CPE au Sénat.

- 1er mars: Adoption du CPE par le Sénat, ce qui le rend définitif, sous réserve du vote de l'ensemble du projet de loi sur l'égalité des chances.
- Treize universités sont en grève (blocages, filtrages ou fermeture totale pour l'une d'entre elles).

- 2 mars : Jacques Chirac qualifie le CPE d'"instrument capital pour ouvrir les portes des entreprises".

- 5 mars : Syndicats d'étudiants et de salariés rappellent, sondages à l'appui, qu'ils ont réussi à convaincre l'opinion des dangers de ce contrat de travail réservé aux jeunes de moins de 26 ans et résiliable sans motivation pendant deux ans.
Après avoir donné crédit au gouvernement de sa volonté de s'attaquer au chômage des jeunes, les Français ont en effet affiché une hostilité croissante au CPE : selon un sondage CSA, ils sont désormais 63% à estimer qu'il sera inefficace, contre seulement 43% à la mi-janvier.

- 6 mars : La mobilisation des syndicats de salariés, d'étudiants et de lycéens pour obtenir le retrait pur et simple du contrat première embauche (CPE) se précise. Dans les universités et des lycées, notamment là où des occupations ont eu lieu ces dernières semaines, l’appel à manifester devrait se traduire par des grèves de cours.

- 7 mars : Plus de cent soixante manifestations réunissant plus d'un million de travailleurs, lycéens et étudiants, ont eu lieu dans toute la France.

«Partant de nos pratiques professionnelles, nous constatons l'extension des formes de précarité pour la jeunesse», ont souligné les syndicats selon lesquels «la précarité nourrit la précarité».

Conclusion :
« La sauvegarde du Code du travail vaut bien une grève », comme l’a rappelé récemment et publiquement J-C Mailly, le secrétaire général de Force Ouvrière.

Alors ?
Salariés, retraités et chômeurs de l’action sociale et médicosociale sans but lucratif, tous ensemble, aux manifestations pour le retrait du CPE et la sauvegarde du Cde du travail !

05 mars 2006

 

Première Jurisprudence C.N.E.

JUSTICE

Voici comment deux employeurs ont vu leurs manœuvres de contournement de la législation du travail, avec le Contrat Nouvelle Embauche, condamnées. (CPH Longjumeau, 20 février 2006, n° F 05/00974)

À la clef : l’obligation de verser au salarié 16440 € de dommages-intérêts pour rupture abusive d’un contrat à durée indéterminée en période d’essai et d’un C.N.E en période de consolidation, 92,75 € au titre de l’indemnité de rupture de 8 %, sans compter 23,19 € au titre de la contribution aux Assedic et 1 000 € au titre des frais irrépétibles. Au-delà de la particularité de l’affaire, on retiendra la vigilance des magistrats quant au motif de recours au CNE car tout motif n’est pas légitime.

Les faits : Engagé le 21 mai 2005, par C.D.I en tant que contrôleur technique automobile, le salarié n’a pris ses fonctions que le 7 juin suivant, après obtention d’un agrément préfectoral. Son contrat prévoyait une période d’essai d’un mois renouvelable, période d’essai effectivement renouvelée le 6 juin 2005. Le contrat est rompu un mois plus tard, le 6 juillet, et le jour même, le salarié se voit offrir alors un autre poste, dans une autre entreprise, cette fois-ci en C.N.E, contrat qui, lui aussi, est rompu quelques temps plus tard, le 30 août.

La réaction : Deux ruptures coup sur coup, c’en est trop pour l’intéressé, qui saisit le conseil de Prud’hommes le 7 octobre et obtient justice.

Commentaires : Cette affaire peut se résumer à la formule suivante : deux contrats, deux abus :

1) Rupture du contrat à durée indéterminée et premier abus : « La rupture de la période d’essai par la Sarl ACG est abusive, n’ayant pas pour motif le manque de compétence du salarié mais étant destinée à éluder l’application du droit protecteur du licenciement par le recours au contrat nouvelle embauche au sein d’un proche partenaire de l’employeur.»

Le contrat a-t-il été rompu pour remplacer un salarié dans une entreprise partenaire ou l’employeur n’avait-il plus besoin du salarié ?

Selon le conseil des Prud’hommes de Longjumeau, dans les deux cas, de toute façon, la rupture de l’essai est abusive : l’essai ne peut être rompu que pour un motif lié aux capacités professionnelles du salarié.

2) Deuxième contrat et deuxième abus : selon le rapport présenté au président de la République, le C.N.E est destiné à rassurer les chefs d’entreprise ayant des difficultés à anticiper l’évolution de la conjoncture économique ou à apprécier les qualités du salarié.

Rien de tel en l’occurrence, les compétences du salarié étant connues et son embauche en C.N.E destinée à remplacer un salarié en congé. Et les juges d’enfoncer le clou : si, comme son nom l’indique, le C.N.E est destiné à favoriser de « nouvelles embauches », il ne peut être utilisé dans le seul but de précariser la situation d’un salarié et d’éluder le droit du licenciement.

En l’occurrence, l’utilisation du C.N.E a «induit une précarisation de la situation du salarié qui n’est en aucun cas justifiée par l’intérêt de l’employeur, qui pouvait avoir recours au contrat à durée indéterminée de droit commun ou, si besoin, au C.D.D de remplacement de salariés en congés pendant le mois d’août», ont-ils conclu.

Dernière erreur de l’employeur, celle-ci de procédure: le C.N.E a été rompu par lettre remise contre décharge alors que le texte exige une lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

Si la portée de cette décision doit être relativisée, s’agissant d’un premier jugement de conseil de Prud’hommes, elle doit toutefois inciter les employeurs à la prudence dans l’emploi du C.N.E, de sa conclusion à sa rupture.

06-03-06 d’après L.S.

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